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Page:Bouasse - Bases physiques de la musique.djvu/77

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CHAPITRE V.

même ; il faut que chaque accord partiel soit une consonance ; mais la condition n’est pas suffisante (voir un exemple au § 3). Helmholtz parvient à expliquer les résultats généraux des Traités d’Harmonie[1].


44. Continuité de la consonance et de la dissonance. Rôle du timbre. Instruments à vent. — D’après la théorie précédente on ne peut pas séparer par une barrière les consonances des dissonances ; entre les unes et les autres il existe une série continue de degrés, d’accords dont la dureté augmente progressivement. Conformément à cette conclusion et malgré les classifications usitées, la limite entre les intervalles consonants et dissonants a singulièrement varié au cours des temps. Les Grecs considéraient la tierce comme une dissonance ; il est vrai qu’ils ont souvent employé la tierce pythagoricienne (voir § 56), qui correspond au rapport 81:64, et qui est nettement une dissonance. La double octave du fondamental le plus haut bat avec le cinquième harmonique du fondamental le plus bas. Mais ils ont aussi connu la tierce naturelle qui n’est pas elle-même, si l’on veut, une consonance parfaite. De même les tierces mineures ne sont considérées comme des intervalles consonants que depuis un.petit nombre de siècles.

Conformément encore à la théorie, le degré de dureté des accords varie singulièrement avec le timbre des sons utilisés. Pour les grands tuyaux bouchés de l’orgue qui émettent un son très approximativement simple, il n’y a guère que l’intervalle de demi-ton et de ton qui soient des dissonances. Les octaves fausses et les intervalles voisins de l’octave, si abominables sur l’harmonium et même sur le piano, ont une douceur relative. Quand on joue sur le registre bouché de l’orgue des compositions à plusieurs par-

  1. Ce n’est pas l’opinion de nombreux musiciens qui ont écrit sur la musique. Malheureusement ils ne se rendent pas un compte exact du rôle et de la nature d’une théorie physique. Ils prennent pour des explications scientifiques des opinions esthétiques. Ils ont toujours à la bouche le sens artistique, le sentiment musical, données sur lesquelles il est juste possible de construire une théorie métaphysique. Je ne veux pas dire que tout soit parfait dans la théorie d’Helmholtz, mais c’est la seule théorie physique que nous ayons.