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Page:Bouchard - Les Chasseurs de noix, 1922.djvu/208

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très lentement ; à chaque pas, il lui fallait mouvoir tout un côté de son corps d’une seule pièce. Peu à peu cependant, ses jambes retrouvèrent un peu de leur souplesse accoutumée et elle put marcher plus facilement et plus vite.

Mais ce ne fut que plus tard dans la matinée, quand elle s’engagea sur un grand plateau sablonneux et couvert de pins élancés, dont les fortes senteurs balsamiques se répandaient au loin, que la jeune fille sentit ses forces lui revenir tout à fait et qu’elle se remit à marcher avec sa vigueur ordinaire.

L’Indienne venait de reconnaître le sol de son pays, et cela faisait sur elle l’effet d’un puissant tonique.

Il lui fallut cependant marcher encore tout le reste de cette journée avant d’atteindre le village qu’elle avait quitté l’automne précédent, et où elle allait retrouver son père.

À la pensée de son père, Ohquouéouée sentait bondir son cœur d’allégresse. À mesure qu’elle s’était éloignée de la rivière Saint-François, le souvenir du jeune Canadien, s’il ne s’était pas effacé, avait du moins perdu de son emprise sur la jeune fille ; et l’image de son père était devenue de plus en plus présente à son esprit à mesure qu’elle se rapprochait de son village.

« Comme le vieux chef allait être heureux de revoir sa fille, qu’il avait sans doute cru perdue sans retour ! Comme elle allait être heureuse de reprendre, aux côtés de son père bien-aimé, la vie paisible que son enlèvement par les ennemis de sa nation avait interrompue si brusquement ! »