Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/125

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Nous sommes à une hauteur de deux mille deux cent trente-deux mètres ; des cimes plus élevées nous entourent.

J’ai, dans la montée, quitté plusieurs fois la voiture pour mieux voir. Je suis très-fatigué, il me semble qu’un bain me reposerait, et la fantaisie me prend, tandis qu’on faisait souffler les chevaux, de me baigner dans ce lac. À peine résolu, aussitôt exécuté. L’eau n’était pas chaude tant s’en faut, mais n’étant pas gelée, elle était certainement au-dessus de zéro. À peine y étais-je, qu’aperçu par un domestique de l’hôtel, il accourut pour me dire que cette eau allait me rendre perclus. Je n’en croyais rien, car j’avais affronté de l’eau plus froide et mêlée de glaçons sans en éprouver le moindre inconvénient. Mais le bruit du fouet du postillon annonçant que la voiture allait partir était un avis plus inquiétant, et je me hâtai de me rhabiller, non complètement reposé, mais, comme je m’y attendais, réveillé et me sentant de grand appétit : aussi j’apprends avec peine que ce n’est qu’à Andermatt que nous devons dîner. Au surplus, je ne suis pas le premier qui me sois baigné dans ce lac ; le postillon me dit que l’année précédente un monsieur qu’on disait docteur y avait fait la même chose, qu’il y était même venu exprès.

Qui sait si ce n’était pas dans l’intention d’y fonder un établissement hydrothérapeutique. L’idée n’était pas mauvaise, et si l’on y eût donné suite, les bains du Saint-Gothard remplaceraient probablement aujourd’hui ceux d’Aix ; et le rhumatisme et la goutte, qui ont résisté à la vapeur et aux douches brûlantes, disparaîtraient peut-être dans la neige fondue.