Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

animées. La dame noire et son mari étaient grecs de Constantinople. Ils voyageaient en touristes ; ils avaient vu la meilleure société de Paris et de l’Italie qu’ils connaissaient parfaitement. Nous causâmes jusqu’à dix heures et demie, et chacun fut se coucher.

Je passai une mauvaise nuit. Le bruit assourdissant de cette chûte qui tombe sous mes fenêtres, la pluie qui les bat de son côté, le vent qui s’en mêle, forment une cacophonie terrible qui me dit que le sommeil, s’il est possible ici, est au moins assez difficile. Cependant la fatigue l’emporte : par instant, je m’endors, mais ce n’est pas pour longtemps. Bientôt je me réveille en sursaut, croyant que la maison s’écroule et qu’une poutre me tombe sur la tête. Je m’apprêtais à gagner la campagne, quand je me rappelle que je suis dans un lit, à cent pas d’une cascade, et que la poutre n’est autre qu’un édredon trop chaud pour la saison et qui, en m’étouffant, m’a donné le cauchemar.

Le lendemain, mercredi 23 septembre, je me lève un peu brisé. Je cours à ma fenêtre pour revoir cette damnée cascade qui m’a fait tant rêver ; je l’admire encore, tout en lui jetant un regard de travers, et je quitte cette chambre que je ne verrai plus. Je paie ma dépense qui, pour un bel appartement et un excellent souper, n’excède pas douze francs, ce que je trouve fort raisonnable, et je m’apprête à partir.

L’omnibus m’attendait ; il me conduit au chemin de fer qui traverse le Rhin à cinquante pas de la chûte. On la voit de là sous un nouvel aspect.

Je retrouve Schaffouse, jolie ville, bien habitée, aux environs charmants, ayant une bibliothèque que je n’ai