Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/28

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que cette paix est, selon moi, ce que Napoléon a fait de mieux depuis son arrivée au pouvoir, et je la préfère même à sa victoire. Un étourneau aurait agi comme le voulaient les badauds et quelques journaux batailleurs, mais un échec pouvait tout perdre, et la victoire même nous devenir funeste. L’avenir, je n’en doute pas, rendra justice à une politique qui n’a pas voulu jouer le sort de la France à croix ou pile, et qui a un mérite que je mets au-dessus de tous les autres : c’est d’avoir évité l’effusion du sang.

Il est beau de rompre une lance
Pour sa dame et pour son pays
Au cri : Montjoie et saint Denis,
Ou comme ce bon roi de France,
De la croix prenant la défense,
Livrer bataille aux Osmanlis ;
Mais il est encore, je pense,
Quand la gloire nous tend les bras,
Repoussant sa magnificence,
Plus beau de ne se battre pas.
Un héros, qu’est-ce ? Un météore
Laissant des ruines sur ses pas…
De tes enfants, au minotaure,
Dis, peuple, ce qu’on immola,
Et combien coûte un clou qu’on dore
Pour la couronne d’Attila ?
Assez de sang ! Rois, halte-là !
On vous encense, on vous adore ;
Être aimé vaut bien mieux encore.
Le secret ? Dieu vous le dira :
Fermez la boîte de Pandore,
L’humanité vous bénira.

J’entre chez le major à qui je voulais offrir un déjeûner d’adieu, mais il est sorti. Il pleut : or, Paris n’est pas gai en temps de pluie, surtout aux jours de grandes fêtes et quand la circulation des voitures est interrompue