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dîner, elle est avec ses filles qui gardent le plus parfait silence. La mère échange avec moi quelques paroles.

M. Scholl nous raconte les espiègleries des jeunes princes de la famille royale de Naples, qu’il accompagna souvent comme officier de la garde. Un jour, il se promenait à Chiaja avec l’un d’eux, âgé d’une quinzaine d’années, quand celui-ci remarque une société de gens attablés à l’air et mangeant des frutti di mare (des coquillages). Une voiture de place était arrêtée à quelques pas ; notre espiègle trouve moyen d’attacher une ficelle à un pied de la table et, par l’autre bout, à la voiture. Un moment après, le cocher fouette les chevaux, la voiture part, et la table la suit au grand ébahissement de ceux qui y étaient assis.

Les jours de bal, l’étiquette veut que les hommes soient en habit, l’ordre en est même affiché ; néanmoins on y met de la tolérance : on permet aux jeunes gens d’y venir en redingote parce qu’ils sont jeunes, et aux vieux parce qu’ils ne le sont plus ; de façon que le premier jour, prenant le programme au sérieux, j’y fus en habit, et j’y étais seul.

Notre table, ai-je dit, est ordinairement bien composée, et souvent, au dîner, les bons mots se succédaient. Je regrette de les avoir oubliés. Je me souviens pourtant que M. Turner disait un jour qu’il n’avait pas voulu apprendre l’allemand, parce que les femmes y étaient neutres. — La plaisanterie n’est pas mauvaise, mais n’est pas tout-à-fait juste : il n’y a de neutre en allemand que les jeunes filles et les vieilles femmes, les jeunes mères sont féminines.

C’est par les d’Haugeranville que Mme Gregory est