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DEUX DE TROUVÉES

« Je frémis en entendant Éléonore prononcer ces paroles, dont je ne compris que trop bien la vérité. Mme Deguise se mit à réfléchir. Nous la suppliâmes les mains jointes, de nous servir de mère.

— Mes pauvres enfants, que voulez-vous que je fasse ? Tout ce que je puis, c’est d’écrire à M. de Grandpré et le prier de parler à M. de M***, qui est son ami. Je lui parlerai aussi. Il ne faut pas désespérer tout-à-fait ; je l’attends demain. Quant à vous, mon cher monsieur Meunier, retournez chez vous au plus tôt. Ne venez pas ici avant que je vous fasse savoir de mes nouvelles ; je vous en ferai parvenir bientôt.

« Les paroles de Madame Deguise nous laissaient encore un espoir ; et quand je quittai Éléonore j’étais plus tranquille.

« Je fus un grand mois, sans recevoir aucune nouvelle. J’attendis encore deux semaines ; enfin n’en pouvant plus d’impatience et d’inquiétude, je me rendis à Sorel.

« Éléonore n’était plus chez Mme Deguise ; elle était retournée chez son père. J’appris dans le village qu’il avait résolu de lui faire épouser le docteur G***, jeune médecin de la ville de Montréal, qui l’avait demandée en mariage. Je résolus de voir secrètement Éléonore, et je profitai d’un voyage que son père fit quelques jours après, pour la faire consentir à me suivre dans l’état de Vermont, où un ministre protestant de St. Albans nous maria, sans aucune difficulté. Le surlendemain je la ramenai à Sorel, où son père n’était pas encore revenu.

« J’étais coupable ; je fus la cause de cette faute qui devait avoir pour nous deux de si tristes résultats. — Pauvre enfant n’ayant point subi la douce influence