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UNE DE PERDUE

— Mais sans doute. Et nous avons été tous surpris de voir que tu te soumettais si bonassement à te la laisser enlever par le général.

— Oui, mais sais-tu que ç’aurait été une lutte à mort, entre le général et moi ?

— Tu as donc eu peur, toi Burnouf ; toi qu’on désigne pour notre prochain général, au cas où Antonio Cabrera viendrait à mourir ou à nous abandonner ?

— Peur, nom d’un cratère ! peur, moi, Jean Burnouf !

— Dame, aussi, pourquoi ne l’as-tu pas disputée au général ?

— Je vais te dire : c’est que je n’étais pas trop sûr que j’eusse le droit de mon côté ; car vois-tu, sans l’arrivée opportune de la corvette, la polacre et son équipage, et moi par dessus le marché, étions tous flambés. Je craignais que nos gens ne se déclarassent en faveur du général ; ce qui, sans m’avancer, m’aurait rendu tout au moins suspect, pour ne pas dire plus ; et avec le général il ne fait pas bon de s’y frotter, à moins qu’on ne soit bien sûr de son coup. J’ai mes plans ; je t’en parlerai plus tard. En attendant, il serait à propos d’avoir l’opinion de nos gens.

En ce moment un coup de sifflet se fit entendre sur le roc au-dessus, et se renouvella par trois fois. C’était le signal de l’arrivée de quelqu’un de la bande.

Aussitôt une échelle de corde fut hissée par le moyen de palans. Cinq minutes après, un homme, revêtu d’une blouse grise et couvert d’un large feutre blanc, parut au milieu des pirates, qui s’étaient tous levés pour le recevoir. Cet homme c’était Antonio Cabrera.