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DEUX DE TROUVÉES.

personne ne put y entrer ou eu sortir, sans être soumis à une triste inspection.

La vie inactive que St. Luc menait depuis quelque temps commençait à l’ennuyer ; ne voulant pas prendre la moindre part aux événements politiques, il évitait, autant que possible, de rencontrer ceux dont les idées hostiles aux patriotes lui déplaisaient. Il n’y avait pas de bals ; on ne donnait plus de soirées. Tout était triste et morne dans la ville ; il n’y avait de vie et d’activité que parmi les volontaires et les bandits de la cité.

Un soir, entre sept et huit heures, il tombait une neige à gros flacons, le vent soufflait par rafales, les rues étaient presque désertes. Trim, un casque de loutre sur la tête, des hottes de jarrets d’orignal par-dessus ses pantalons, un capot de craint-rien que serrait à la ceinture une bande de cuit bouclée, suivait, une canne à la main, son maître qui marchait à quelque distance en avant. St Luc, par précaution, se faisait suivre par Trim quand il sortait le soir, ; mais il lui avait expressément enjoint de ne jamais intervenir dans les difficultés qu’il pourrait avoir, à moins qu’il ne lui en donnât l’ordre, soit en frappant avec sa canne sur le pavé ou le mur des maisons, soit avec un petit sifflet noir, en ivoire, qu’il portait, dans sa poche de gilet, attaché à un ruban. Trim obéissait à ces signaux qu’il comprenait parfaitement.

St. Luc n’avait aucun but dans sa promenade ; il marchait pour prendre l’exercice et s’endurcir à la température du Canada. Trim, lui, trouvait que son maître aurait mieux fait de retourner au sud, sauf à revenir l’été suivant, s’il en avait le désir ;