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UNE DE PERDUE

arrivée, pour vous dire que depuis deux ans que je vous cherche partout. J’ai visité tous les couvents de votre patrie, de la France, de l’Espagne ; vous demandant à toutes les portes des monastères, et ne vous trouvant pas. Ah ! Sara, ayez pitié de moi !

— Pourquoi me cherchiez-vous, monsieur ?

— Pour vous demander pardon, comme je l’ai obtenu de votre père ; pour vous supplier de ne pas me conserver de haine ou de mépris ; pour que vous me disiez de votre bouche que vous ne me maudissez pas.

— Est-ce que Jésus-Ghrist n’a pas pardonné à ses persécuteurs ?

— Vous me pardonnez donc ?

— Jésus-Christ n’a-t-il pas prié son Père de leur faire grâce en sa faveur, parcequ’ils ne savaient ce qu’ils faisaient.

— Oh ! si tu savais, reprit Cabrera, avec éclat dans sa voix, ne pouvant plus réprimer l’exaltation de sa parole, les jours d’angoisse que j’ai passés ; si tu savais les nuits d’insomnie pendant lesquelles l’horreur de mon crime me torturait, tu me pardonnerais à cause de tant de douleurs, et non pas seulement par devoir de religion ; mon crime, c’était parce que je t’avais trop aimé. Pour toi, j’ai renoncé à ma vie de corsaire, qui me faisait horreur ; je voulais te le dire.

— Je l’ai su.

— Pour toi, j’ai obtenu mon pardon.

— Je le sais ; mais pourquoi me dire tout cela ? continua-t-elle d’une voix faible et émue.

— Pour toi, j’ai obtenu que l’on révisât en Espagne un jugement injuste, qui m’avait lancé dans une