Aller au contenu

Page:Bouchet - Le Panégyrique du chevalier sans reproche.djvu/12

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ayant partagé les lauriers de ces trois monarques dans les champs de Fornoue, d’Agnadel et de Marignan, trouva la mort à Pavie, au moment où le Roi, moins heureux, perdoit sa liberté, et qui, après avoir fourni une longue carrière, mérita le nom de sans reproche, parce que, dans des temps de troubles, il sut la remplir d’actions brillantes et d’éminens services, sans enfreindre jamais aucun de ses devoirs.

Bouchet, suppléant aux talens qui lui manquent par la connoissance parfaite qu’il a de son héros, ne se montre pas au-dessous d’un tel sujet. Il retrace avec rapidité les faits d’armes et les travaux politiques de La Trémouille ; le fait souvent parler d’une manière convenable, et caractérise très-bien sa valeur et sa prudence, soit dans les combats, soit dans les négociations ; mais c’est surtout lorsqu’il peint des scènes domestiques, qu’en excitant l’intérêt le plus vif, il parvient à satisfaire en même temps, et le savant qui étudie les mœurs, et l’homme du monde qui ne cherche que des anecdotes curieuses.

La Trémouille, à peine sorti de l’enfance, contracte une liaison intime avec un gentilhomme un peu plus âgé que lui, et qui vient d’épouser une demoiselle de dix-huit ans. Il s’établit dans leur château, partage tous leurs plaisirs, et vit avec eux comme un frère. La jeune dame, fort sensible, ne peut voir avec indifférence un hôte aussi aimable. Ses sentimens sont bientôt partagés par La Trémouille ; et, comme tous les deux ont cet enthousiasme pour l’honneur et la vertu, heureux attribut de leur âge, Comme ils chérissent celui que leur amour offense, ils frémissent de leur situation. L’époux, qu’ils ont rendu malgré eux témoin de leur trouble et de leurs remords, emploie, pour les ramener à la raison et au devoir, un moyen qui paroîtroit peut-être aujourd’hui fort singulier, mais qui, en même temps qu’il est conforme à l’esprit de l’ancienne chevalerie, prouve une grande connoissance du cœur humain. Après avoir obtenu, par la plus douce indulgence,