CHAPITRE XVII
La Croisière.
Le quai de Saint-Ixe n’est pas de construction fort ancienne, mais inutile au commerce, et n’ayant jamais été réparé, il tombe en ruine. Long de plus d’un arpent, il est cependant loin d’atteindre l’eau profonde sur cette plage qui, à marée basse, étale ses vases à perte de vue. Sauf des goélettes de faible tirant d’eau et des bateaux-pilotes qui y accostent à de rares intervalles, il n’est guère fréquenté que par les petits pêcheurs d’éperlan. Aussi est-il devenu la promenade de prédilection des amoureux.
Rien d’étonnant donc que nous y retrouvions Robert et Irène. Celle-ci les coudes appuyés sur un poteau d’amarrage, braque une jumelle sur la mer déserte. Son compagnon à demi couché sur la poutre en saillie qui fait le bord du quai, contemple Irène. Dans sa main, il tient leurs deux chapeaux pour les mettre hors d’atteinte des caprices du vent, lequel se dédommage en ébouriffant les cheveux de la jeune fille.
Le soleil de juillet inonde de lumière la terre et l’eau ; mais la brise bienfaisante tempère son ardeur et soulève en petits flots écumeux la surface de la mer. Un raz de marée, long ruban d’écume, coupe l’estuaire du nord au sud et marque l’endroit où le flux rencontre le jusant.
Irène abaisse sa lunette et regarde Robert.
— Vous ne les voyez pas, dit celui-ci ?
— Pas encore. Robert, si vous restez ainsi, vous finirez par tomber.