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ROBERT LOZÉ

la gracieuse barque se balance au repos à une encablure du quai, dont la vague commence à lécher la base.

Un canot s’en détache et vient accoster au quai. Jean et Alice en débarquent et sont joyeusement accueillis par les deux jeunes gens. Jean porte le costume blanc et la casquette blanche à visière d’un yachtsman. Sa femme est ravissante dans une toilette fraîche et un chapeau canotier. Le marin qui les a conduits à terre porte un uniforme. Sur son béret on lit le nom du vaisseau : « Alice. »

— Et comment se porte mon filleul, demande Robert en embrassant sa belle-sœur ?

— À merveille. Mais s’il pouvait parler, il se plaindrait de son parrain qui ne l’a pas encore vu.

— Je réparerai ce tort. Où est-il maintenant ? dit le jeune homme en jetant sur le yacht un coup d’œil un peu inquiet.

— Oh ! pas là. Rassurez-vous. Je l’ai laissé aux soins de cette bonne Louise qui l’aime comme son propre bébé. Jean dit que les bébés sont importuns dans les parties de plaisir.

— C’est un père dénaturé.

— Et vous, les amoureux. Êtes-vous toujours décidés à nous accompagner ? demanda Jean.

— Nous sommes prêts, répondit Irène. Nos malles sont faites, nos testaments aussi. Si votre coquille de noix chavire au milieu du golfe, nos héritiers n’auront pas à se plaindre. Je croyais qu’un millionnaire américain ne voyageait jamais qu’en bateau à vapeur, avec un régiment de domestiques, un cellier et un chef de cuisine.

— Petite campagnarde ! Les gens d’esprit, il s’en trouve même parmi les millionnaires, préfèrent la voile lorsqu’ils ne sont pas pressés. Nous flânerons au gré d’Éole, sans bruit et sans fumée. Quant au chef, il est à bord et mous le mettrons sous vos ordres. Alice est notre capitaine ;