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Page:Bouchor - Les Symboles, première série.djvu/182

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AHRIMAN


Ah ! j’ai pitié de toi. Quand tu mourras, pauvre homme,
Ayant vécu pareil à la bête de somme,
A quoi te servira ta stupide vertu ?


ZOROASTRE


Mon âme verra Dieu si je t’ai combattu !
Certes, j’exhalerai mon souffle dans l’espace ;
Mais mon espoir n’est pas fondé sur ce qui passe.
Ma conscience, après l’angoisse de la mort,
Surgira devant moi : si je fus sans remord,
Elle m’apparaîtra comme une vierge pure.
De sa robe de neige et de sa chevelure
S’exhalera, dans l’air resplendissant de jour,
Un parfum de bonheur et de céleste amour.
Alors, pour y subir un jugement terrible
Où la moindre action sera passée au crible,
J’irai, seul, vers le pont qui mène au Paradis.
Là plus d’un, réclamé par les anges maudits,
Expiera durement sa foi dans les idoles ;
Le menteur entendra de cruelles paroles ;
L’assassin, l’adultère et le blasphémateur
Descendront dans le vaste abîme avec lenteur…
Mais moi je franchirai, si mon Dieu me soulève,
Le pont mince et tranchant comme le fil d’un glaive !