Page:Bouchot - De la reliure, 1891.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
21
de la reliure

grand mérite à nos yeux ; ayant à vêtir une œuvre antérieure, ils ne s’embarrassaient pas de restitutions pénibles, ils avaient la naïveté de rester eux-mêmes, ils eussent tout aussi bien affublé Vénus de vertugadins, ou Pallas de loup-cervier et de patenôtres. Cette insouciance s’est continuée jusqu’au dix-neuvième siècle, jusqu’à David. Depuis, une classe de citoyens gradés et honorés de diverses manières s’est donné la tâche hiératique de ramener les idées à une formule unique ; du petit au grand les choses sont ainsi ; l’opinion s’est habituée, l’œil s’est fait à ces modèles ressassés, réédités au point de les confondre avec les idées éternelles et indiscutables dont vivent les religions et les sciences exactes. L’art dans toutes ses manifestations n’est plus une qualité des formes, qualité essentiellement variable, c’est, au rebours du bon sens, une façon de dieu qu’il convient de réputer immuable, définitif, et qui ne vaut que par sa fixité même.

Encore que les redites puissent jusqu’à un certain point s’admettre lorsqu’il s’agit de costumer le livre à la mode de ses contemporains, elles ne s’excusent pas dans le travesti singulier