Page:Boudin - La Fameuse Comédienne, 1688, édition Bonnassies, 1870.djvu/25

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donc durer jusqu’au 16 août 1679 ; et Madame Molière habitait rue de Seine en 1675, date de l’affaire la Tourelle[1]. C’est donc rue de Seine, et non devant l’Hostel de Guénégaud, que la Ledoux a dû être fouettée, puisque l’acte précité porte « devant la maison de ladite Molière. » D’un autre côté, ces exécutions avaient ordinairement lieu dans les carrefours, afin qu’elles eussent plus de spectateurs ; puis le Théâtre même put être considéré comme le théâtre officiel du délit ; enfin le carrefour de Guénégaud était plus rapproché que la rue de Seine du Châtelet, d’où les exécuteurs partirent. On ne peut donc affirmer que, sur ce point, le libelle se trompe.

12° « Et pour toutes intrigues, elle en est réduite à un certain Aubry qui demeure au mesme logis ; il a mis si bon ordre à sa conduite qu’elle n’oseroit voir personne que par sa permission. » — Ce passage contient deux perfides insinuations : il laisse ignorer ce qu’était Aubry et ne dit point la nature des intrigues qu’il pouvait avoir avec Madame Guérin. Aubry n’était rien moins que Jean-Baptiste Aubry des Carrières — nom qu’il avait pris de son métier — Maître Paveur des Bâtimens du Roi, second mari de Geneviève Béjart (Mademoiselle Hervé), qu’il épousa le 19 septembre 1672. Pris sur le tard de la passion d’écrire, il fit deux tragédies, Démétrius, représenté le 10 juin 1689 et Agathocle, le 10 mai 1690. Il habita l’Hôtel d’Arras, qu’il avait loué avec Madame Molière, à partir du 16 août 1673 ; sa femme y mourut le 3 juillet 1675. Il se remaria avant sa belle-sœur, c’est-à-dire avant le 31 mai 1677. Or, pour que les assertions de la Fameuse Comédienne fussent vraies, il faudrait qu’Aubry eût conservé,

  1. Un document transcrit par M. Eud. Soulié prouve qu’elle y demeurait encore le 16 mars 1677.