Page:Boudin - La Fameuse Comédienne, 1688, édition Bonnassies, 1870.djvu/61

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que tout l’esprit et tout le merite imaginables ne sçauroient nous garantir de certains evenemens, luy avoit donné un degoust extresme pour toutes les choses de la vie : il n’avoit point alors de plus grand plaisir que sa maison d’Auteuil, où il avoit mis sa fille.

La mere de la Moliere fut si desolée de ce mauvais menage, qu’elle tomba malade et mourut peu de tems après, mais, ny la mort de la Bejart, ny la melanchollie de Moliere n’interrompirent point les plaisirs de son espouse. L’Abbé de Lavau et plusieurs de ce mesme caractère se mirent en frais pour la desennuyer. Lavau fut un des plus chéris jusqu’à la mort de Moliere, qui arriva d’une maniere toute surprenante.

Il y avoit longtems qu’il se trouvoit fort incommodé : ce qu’on attribuoit au chagrin de son mauvais menage et plus encore au grand travail qu’il faisoit. Un jour qu’il devoit jouer Le Malade imaginaire, piece nouvelle alors et la derniere qu’il avoit composée, il se trouva fort mal avant que de commencer, et fut près de s’excuser de jouer, sur sa maladie. Cependant, comme il eust veu la foule du monde qui estoit à cette représentation et le chagrin qu’il y avoit de le renvoyer, il s’efforça et joüa presque jusqu’à la fin, sans s’appercevoir que son incommodité fust augmentée. Mais, dans l’endroit où il contrefaisoit le mort, il demeura si foible