Page:Boudin - La Fameuse Comédienne, 1688, édition Bonnassies, 1870.djvu/73

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avec assez de passion pour luy garder une fidélité à toute espreuve, elle auroit tousjours besoin d’elle pour se conduire, et qu’elle la prioit de ne luy pas refuser ses soins toutes les fois qu’elle en auroit besoin. « L’inclination que j’ay à vous rendre service ne peut finir par vostre mariage, luy dit la Chasteauneuf ; mais il n’est pas tems de songer à une nouvelle intrigue, et il faut du moins observer quelque régularité dans ces commencemens. Mais pressez vivement la chose. »

La Chasteauneuf gouvernoit la Moliere si absolument, qu’elle suivoit de point en point tout ce qu’elle luy recommandoit, ou se contraignoit autant qu’il luy estoit possible : elle pressoit continuellement Du Boulay de luy tenir parole. Il luy donnoit tous les jours quelque nouvelle excuse, tantost sur les oppositions que sa famille luy pourroit apporter, si l’on ne menageoit cette affaire délicatement ; une autre fois, il luy disoit que, n’ayant plus rien à ménager quand elle sera sa femme, il craignoit qu’elle n’eust pas pour luy toute la complaisance qu’il pourroit souhaitter. Enfin, fatigué des importunitez de la Moliere, il luy déclara que, quoyqu’il eust pour elle toute la oassion imaginable, des raisons puissantes ne luy permettoient pas de la contenter sur le chapitre du mariage.

Cet aveu sincere surprit la Demoiselle, qui