Page:Boudin - La Fameuse Comédienne, 1688, édition Bonnassies, 1870.djvu/74

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avoit creu de bonne foy Du Boulay assez amoureux pour l’espouser. Elle ne fut point maistresse de la colere que la connoissance d’avoir esté trompée luy donna, et, dans la violence de ses mouvemens, elle le traitta comme le dernier de tous les hommes : après l’avoir appelé mille fois scelerat, perfide, et luy avoir juré qu’il auroit tout lieu de se repentir d’avoir abusé de sa facilité, elle le chassa, en luy deffendant de revenir jamais chez elle.

Du Boulay, qui n’avoit pas respondeu un seul mot à toutes ses menaces, se retira tout doucement, pour ne la pas aigrir davantage ; il luy escrivit le lendemain la lettre du monde la plus passionnée, où il la prioit de l’excuser si, luy connoissant trop de vertu pour consentir à le rendre heureux, sans la promesse qu’il luy avoit faite, il avoit esté forcé par son amour à se servir de cette ruse, qui devoit estre pardonnable dans cette occasion.

La Moliere, en femme habile, ne luy voulut point faire de response, sans consulter la Chasteauneuf, à qui elle avoua la faute qu’elle avoit faite d’avoir pû croire un homme sur sa parolle, mais que Du Boulay l’avoit si fort pressée, qu’il luy avoit esté impossible de s’en deffendre, et que ce seroit la derniere fois qu’elle manqueroit par un excès de confiance ; qu’elle la prioit de l’instruire de ce qu’elle avoit à faire ; qu’elle avoit fait reflexion, lorsque sa colere avoit esté