Page:Boudin - La Fameuse Comédienne, 1688, édition Bonnassies, 1870.djvu/78

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d’aller rechercher une figure comme la sienne dans le fond d’une province, sans le refus qu’elle avoit fait d’entrer dans la troupe, si on ne l’y recevoit aussy, et que, pour reconnoissance, il y estoit à peine entré qu’il l’abandonnoit pour une guenon, elle, qui estoit une des plus jolies femmes du monde ! Guerin, le plus dissimulé de tous les hommes, et qui ne se sentoit pas assez bien avec la Moliere pour la quitter tout à fait, luy fit cent protestations qu’il l’aimoit tousjours, et que ce n’estoit que pour se maintenir tous deux dans la troupe, où la Moliere estoit la toute-puissante, qu’il luy rendoit ces sortes de devoirs, si bien que la Guyot, qui l’aimoit, se laissa persuader tout ce qu’il voulut ; aussy, continua-t-il tous ses soins pour la Moliere, qui les recevoit en femme à qui cela faisoit plaisir.

Mais Du Boulay n’en estoit pas plus satisfait : il trouvoit fort mauvais qu’elle fist mille avances à un malheureux, pendant qu’elle le traittoit avec la derniere indifférence ; il luy en dit ses sentimens avec quelque colere ; elle, qui ne croyoit pas qu’un amant luy pust eschapper, luy respondit avec beaucoup d’aigreur qu’elle trouvoit fort mauvais qu’il censurast sa conduite ; qu’elle pretendoit estre maistresse de ses actions, et que, s’il voyoit quelque chose, chez elle, qui luy deplust, il estoit maistre de n’y plus revenir ; qu’il falloit l’aimer telle