Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/108

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ment de ma guérison, c’est-à-dire celui où je te reverrai.


Ce 21. — Tu n’auras plus que des plaintes et des doléances à lire, ma pauvre femme, jusqu’à ce que tu revoyes ton pauvre homme de douleur ; son âme sera triste jusqu’à ce que tu aies dit une parole et ses maux dureront jusqu’à ce que tu les panses. Je me vois pour comble d’infortune dans des circonstances bien embarrassantes : la colonie de Gorée ne doit plus être fournie par la Compagnie au premier de juillet prochain, c’est-à-dire dans neuf jours ; son magasin est épuisé, le nôtre n’est point commencé à remplir. J’attends toujours un bâtiment de France qui, suivant ce qui a été convenu entre le ministre et moi, doit nous apporter des munitions de guerre et de bouche, mais les commis, qui sont en sûreté dans leur bureau, ne songent point à notre défense et comme ils ne comptent point sur nos provisions pour leur subsistance, ils s’en inquiètent peu. Je suis donc obligé de penser et de pourvoir à tout sans moyens, sans argent, sans marchandises et trouvant à chaque pas des obstacles dans la mauvaise volonté des gens qui m’ont le plus d’obligation. Malgré tout cela, nous vivrons, mais ce sera un tour de force. Quand viendra le temps où je n’aurai plus besoin que de ton dîner pour vivre ? Je ne parle pas du souper, car je ne soupe plus, mais on pourra y substituer un autre repas pour lequel l’appétit ne me manquera jamais.


Ce 22. — Devine à quoi je m’occupe en ce moment ? À tracer de ma main le plan de l’église et des prisons. Tu vois que je pense à tout et que je m’oc-