Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/109

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cupe à la fois de Dieu et du Diable. Si je travaillais d’après ma connaissance des goûts, des mœurs, des principes de tout ce qui est ici, il faudrait des prisons pour tout le monde et d’église pour personne. Je joins à cela des règlements de police pour l’alignement des rues, pour leur nettoiement, pour des rondes à différentes heures de la nuit, etc. Enfin je ressemble à M. Tessier, qui lisait si bien des comédies, et je joue tous les rôles sur mon petit théâtre ; mais si mon parterre est aussi assoupi que moi, je crains fort de n’être point applaudi. Adieu, mon enfant ; voilà de nouveaux élancements au bout de mon malheureux doigt qui me forcent à quitter la plume.


Ce 23. — C’est un panaris bien décidé et qui ne me permet pas d’écrire autre chose que je t’aime.


Ce 24. — Les douleurs augmentent avec les chaleurs. On m’a coupé un tiers de l’ongle et mis la pierre infernale en-dessous. Je souffre comme un malheureux.


Ce 25. — Je me désespère et je crains une opération.


Ce 26. — Les douleurs sont un peu moindres, mais la moindre approche de quoi que ce soit est un coup de poignard et je crois qu’il n’y a que toi qui ne me ferais pas de mal en me touchant.


Ce 27. — Je change d’emplâtre et de traitement plus souvent que de chemise ; la pierre infernale est toujours en jeu et à mesure qu’on brûle des chairs elles reviennent au double. Mon doigt est une vilaine