Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/158

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ont l’air content au milieu du manque de tout, dans une masure sans porte, sans fenêtres, sans lit, sans armoires, sans plancher, tu verrais qu’il y a une récompense attachée au dévouement des femmes qui suivent leurs maris. Mais ton principe à toi est que les maris doivent suivre les femmes ; il faudra accorder nos deux avis en ne nous quittant plus.


Ce 27. — J’ai encore peur pour un pauvre garçon menuisier que j’ai amené avec moi, qui est la santé, la force, la gaîté, la bonté même, et le voilà à l’hôpital entre les mains des bourreaux. Il est vrai que, comme il est à moi, je prendrai sur moi de le conduire quelquefois moi-même. Encore Dieu sait si cela se pourra, car, après les droits de la mort, ce sont ceux de la médecine qui souffrent le moins d’atteinte. À propos je ne sais si je t’ai dit que ce pauvre abbé Miolan, devenu M. Prelong, est directeur de mon hôpital et qu’il s’acquitte de son emploi comme la meilleure sœur de charité. Je ne connais en lui rien que de parfaitement bon, mais à force de douceur, de révérences et de compliments, il est parvenu à déplaire à tout le monde. Il y a de ces malheurs-là et même on en court les risques auprès de toi, car tu ne pardonnes pas le ridicule, excepté peut-être à ton bon mari. Adieu.


Ce 28. — Le temps devient plus beau de jour en jour : les nuits sont quelquefois chaudes, mais les matinées sont fraîches et même quelquefois à midi et à deux heures la chaleur n’est point insupportable. J’ai passé ma matinée à l’air à faire travailler de cinq ou six côtés et je n’ai point souffert. Ce que tu as vu en petit se retrouve ici en plus grand et se