Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/179

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osé me le promettre et rien ne paraît bien parce que tout a le défaut d’être fait à trop bon marché, parce que j’ai trop examiné les détails, trop combattu les abus, trop confondu les fripons et trop inquiété les mal intentionnés. Le commerce de son côté n’a jamais été si florissant dans la partie que j’ai conservée sous ma direction, jamais tant de liberté, jamais une protection aussi efficace, jamais de secours aussi puissants, jamais tant de produits, tous les habitants sont étonnés de leurs richesses, les logements se louent plus cher qu’ils ne se vendaient autrefois, toutes les choses nécessaires à la vie abondent malgré l’augmentation de la population et personne encore n’est satisfait. Cependant je vois à la désolation que cause mon départ, aux tristes spéculations qu’on fait sur ce qui se passera dans mon absence, au mauvais gré qu’on me sait intérieurement du parti que je prends, qu’on a plus besoin de moi qu’on ne le croyait et que la colonie me regarde comme la santé dont on ne sent le prix que quand on la perd. Mais c’est assez me plaindre et trop me louer ; ne pensons plus qu’au plaisir de te tenir encore une fois et bien des fois encore dans mes bras, et tantôt de me tout rappeler et tantôt de tout oublier avec la plus aimée des femmes.


Ce 9. — Voici encore de nouvelles affaires. Ce maudit roi que j’ai si bien traité l’année dernière ne vient-il pas de rompre tout commerce avec le Sénégal, sans doute par quelque mécontentement particulier de la Compagnie. Je lui dépêche en ce moment un courrier pour le faire expliquer et lui annoncer une rupture ouverte, au cas où il ne lèverait point sa défense. J’ai peur que cette maudite