Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/95

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qu’exigera notre demeure future, afin que tu ne sois pas mécontente de ton bon gros fermier et que tu ne casses pas ton bail à vie avec ce pauvre diable qui t’aime tant.


Ce 14. — Si tu étais venue dîner chez moi aujourd’hui, je t’aurais donné à choisir d’un chat-tigre ou d’un rat palmiste, qui étaient tous les deux excellents. Hélas, quand recommencerons-nous nos petits ragoûts de Spa et d’Aix-la-Chapelle ? C’est le temps qui revient le plus souvent et le plus vivement à ma mémoire, parce que c’est celui où nous étions le plus l’un à l’autre, et en vérité tout le reste n’a rien qui en dédommage. Mais enfin les heures coulent ; elles emmènent les jours ; elles entraînent les mois et l’année s’écoulera et nous nous reverrons.


Ce 15. — Je pars décidément demain ; je suis au milieu d’un gros tourbillon de petites affaires, qui bourdonnent autour de moi comme un essaim de mouches. Je voudrais les chasser toutes pour te parler un moment, mais elles ne le permettront point ; n’importe, je te baiserai malgré elles.


Ce 16, à Wanamguiander. — Je suis excédé de fatigue, je me suis perdu, je me suis écorché, je me suis brûlé. Hommes et bêtes, tout est déjà sur les dents et c’est tout ce que je puis faire que de te le mander.


Ce 17. — Fatigue sur fatigue, mal sur mal, plaie sur plaie ; j’ai cependant fait ma journée, mais je ne pense pas sans frayeur à celle de demain. Encore si c’était pour arriver à Spa ou quelque autre part où tu fusses ! Mais tu n’y seras pas !