Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/97

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déjà bien maigri ; mais tu ne l’en embrasserais pas de moins bon cœur.


Ce 22. — Toujours de même et pis s’il est possible. Je ne t’écris que par religion et je souffre le martyre en écrivant.


Ce 23. — Cela ne guérit pas, je m’impatiente, je m’emporte et je m’abats tour à tour ; mais tout cela ne sert de rien. En attendant, nous avons des affaires pressées ; il ne nous reste que pour trois semaines de vivres. Voici par bonheur un bâtiment américain qui en est chargé et dont je m’accommoderai à quelque prix que ce soit, aux dépens de cette infâme compagnie que tu protèges.


Ce 24. — J’ai voulu faire cent pas pour voir un exercice ; il a fallu quitter avant la fin et venir me coucher. Je commence à croire que je ne guérirai qu’en France.


Ce 25. — Je souffre un peu moins, mais il est encore matin et je tremble pour l’après-dîner. Je vais profiter de ce bon moment-là pour m’occuper de bien des affaires négligées, car je n’ai encore pris la plume que pour toi.


Ce 26. — Hélas, mon enfant, c’est pis que jamais ; il faut me coucher, me livrer aux chirurgiens comme un triste cadavre et attendre que la nature vienne à bout des maux et des remèdes. J’ai mal à tout mon corps et à tout mon esprit ; il faut m’occuper de tout et je ne puis penser à rien. Les douleurs chassent les idées et par malheur ne s’envolent point comme elles ; mais cependant ton idée restera toujours au fond de