Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/228

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Mais la caste n'est pas seulement « affaire de repas » ; elle est encore et surtout, nous l'avons vu, « affaire de mariage ». Non seulement les croyances traditionnelles incitent aux mariages précoces – un bon Hindou se tient pour déshonoré s'il garde trop longtemps ses enfants célibataires – mais encore elles imposent aux mariages la règle d'endogamie. C'est en dehors de sa famille, mais à l'intérieur de sa caste que le jeune Hindou doit chercher fem­me. Le mariage sera donc ici plus qu'ailleurs un acte religieux, à la consom­mation duquel tout l'ordre social est intéressé. À l'occasion des mariages, la caste reprend conscience de son unité et se réjouit de sa continuité. De là, sans doute, le faste particulier avec lequel ces cérémonies sont célébrées. Tous les voyageurs ont été frappés du luxe que se croient alors obligés de déployer des gens appartenant même aux castes les plus humbles 431 ; il n'est si pauvre caste, nous l'avons vu, qui ne garde son amour-propre collectif et dont les membres ne veuillent faire bonne figure à ces jours solennels. Il y a là, nous dit-on, un véritable danger social. « Les mariages sont souvent la ruine des familles. » Les rapports décennaux du Civil service attirent l'attention sur ce point : « Les paysans hindous font des dépenses excessives pour toutes les cérémonies familiales. La vanité se mêle à ces démonstrations, et on se croit d'autant plus orthodoxe qu'on les exagère » 432.

Les dépenses d'ostentation doivent d'ailleurs, d'une manière générale, mo­ter assez haut dans le budget des plus pauvres familles. M. Monier Williams 433 nous décrit la parure des enfants qu'il rencontre à Bombay, la soie et le satin brodés dont ils sont vêtus, les joyaux qui brillent à leurs poignets ou à leurs chevilles. Les femmes portent de même une profusion de bracelets et d'anneaux d'argent ou