Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/236

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plutôt qu'à celui de la quantité – plutôt au point de vue antique, selon la remarque de Marx, qu'au point de vue moderne – ne pourrait-on soutenir du moins que la spécialisation professionnelle, telle qu'elle est consacrée par le régime des castes, est bien faite pour utiliser et pour renforcer ou raffiner en les utilisant, au mieux des intérêts de tous, les aptitudes variées des races ?

Il importe de remarquer à ce propos qu'on risquerait de se méprendre beaucoup, tant sur les conséquences que sur les conditions de la division du travail, si l'on continuait de croire que partout où elle s'établit, elle se moule en quelque sorte sur la diversité donnée des aptitudes naturelles. À ce compte, la principale raison d'être comme le premier avantage de la division du travail serait en effet, selon la formule de Stuart Mill, de « classer les individus suivant leurs capacités ». Mais l'expérience est loin de confirmer toujours cette prévision optimiste. Spencer lui-même est obligé de reconnaître 445 que les effets de ce qu'il appelle «le facteur psychophysique » (l’ensemble des dispo­sitions, tant spirituelles que corporelles, données à chaque individu) sont le plus souvent contrariés par les effets d'autres facteurs : la part qui revient aux dons naturels, dans l'organisation de l'industrie, reste pratiquement indéter­minable. Même lorsqu'il s'agit de la répartition des tâches entre les sexes, il est de notoriété qu'elle est rarement calquée sur les différences naturelles qui les séparent. Les besognes les plus fatigantes sont souvent réservées au sexe le plus faible 446. On pourrait soutenir, d'après M. Veblen 447, que la plupart des travaux qui ressortissent aujourd'hui aux professions industrielles sont issus de ce qui n'était à l'origine, dans