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PRÉFACE

Ainsi, n’aurait-elle d’autre résultat, en nous mettant au courant des progrès de la sociologie économique, ou politique, ou religieuse, que de nous faire connaître avec plus de précision un certain nombre de faits sociaux, la philosophie sociale nous préparerait déjà, par là même, à mieux remplir une de nos plus importantes fonctions d’éducateur.

Mais elle ne fournira pas seulement de nouveaux matériaux à notre enseignement, elle est capable d’atteindre ses idées directrices, ses tendances profondes, son âme même. Car elle contribuera à l’orientation de notre vie spirituelle, en nous aidant à prendre une conscience plus nette de notre fonction sociale.

Rien n’est plus important pour les destinées de l’enseignement national que cette orientation intime de l’esprit des éducateurs. Auprès de cette question vitale, les réformes extérieures apparaissent comme secondaires. Toutes les transformations de programmes, toutes les multiplications de recettes pédagogiques ne produisent que du papier inutilement noirci tant qu’elles ne correspondent pas, chez ceux qui sont chargés de les appliquer, à un progrès intérieur. Au contraire, que ceux-ci sachent nettement ce qu’ils veulent, ce qu’ils peuvent et ce qu’ils doivent, qu’ils aient défini leur place et mesuré leur rôle dans la société, et l’on pourra se reposer sur leur esprit, plutôt que sur la lettre des réformes : tout ce qu’ils enseignent sera utilement enseigné. C’est pourquoi la tâche la plus urgente de la pédagogie est de former des éducateurs non pas seulement