Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/229

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dans l’agitation d’une langueur connue. Des entreprisesque je formai, vers le temps où le ciel ne blanchissait qu’àpeine, je crains n’avoir rien accompli. L’infatuation de mes désirs m’a trompé sur le prix de leur véracité et je me suis complu parmi des feintes perfides.

Peut-être ai-je empli d’une noire contrition les êtres que j’étais, pourtant, attentif à vêtir du joyeux manteau de la beauté. Quoi ! toute la ferveur que m’inspire le monde n’aboutirait qu’à des blasphèmes, aux malédictions et à la laideur. O mers magnifiques et verdâtres,. frais coteaux qu’étreignent des tremblements d’arbres, antiques pins des sonores forêts, prairies et vous, bons paysans, bucoliques pasteurs de la péninsule, hommes des rivières, pêcheurs prodigues, combien je vous aime et comme vous m’êtes chers ! Vous le présagez en votre âme, car quelques-uns m’ont vu frémir, et l’ivresse du monde soulève ma poitrine ! Vous savez mon attente, mon doute. Que de fois, en proie à d’extrêmes passions, je restai là, sans espérance, contemplant le salubre azur et ces substantiels pâturages dont j’aurais désiré célébrer les délices dans des chants que mon désespoir, la prévision de mon échec, une crainte extraordinaire ne me permirent jamais. En face de ces magnificences je me suis senti dépérir et mon génie défaillit. Il né m’eut pas été loisible de prononcer un dithyrambe. Je restai baigné d’amertume, une mélancolie m’accabla. Ah ! cette lutte avec la nature, de laquelle toujours je sors terrassé. Vous me voyez candide, placide, mais quel tumulte intérieur 1

Comprenez, comprenez enfin ! Les mots des plus prodigieuses hymnes, m’apparaissent desséchés et faux !