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Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/253

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De la fréquentation d’Orphée et de Moïse, cet homme est sorti tout hagard. L’innocence de la mer l’effraie.. Il regarde une Heur avec épouvante. A considérer les hautes pailles des blés, il se rappelle Pau et Cérès. La prophétie des monts répercute d’antiques chants. Lourd d’héroïques hérédités son âme est semblable au chaos. L’excès même de ses sentiments en compose la confusion.

Ses héros manquent de proportion, il les a pourvusd’emphatiques pensées. Afin de faire croire à leur frémissement il en accentue le dessin, le relief, les colorations. Leur infortune l’intéresse. Il en modifie le décor. D’affreuses vagues marines interviennent afin que ces fades événements se teintent d’une manière plus sinistre encore. Assuré de tout émouvoir, cet homme a suscité d’atroces expéditions. Le burlesque et l’élégiaque, les orages, l’émeute populaire, la mansuétude du sacrifice et les conflits de l’ambition, les archanges, Corydon> Tancrède, les éléments, les forêts et l’aurore, le tournoiement des vols de foudre, le prodigieux tumulte que font les forges de fer, les brises, les vertes ramures, d’épaisses futaies luisantes, il utilise tout, sans scrupule aucun, et tout lui devient disponible. Afin d’augmenter notre émoi, Dieu même lui paraît propice. Il ne se défend point d’outrer les sentiments. Ses antithèses opposent des astres et ses métaphores défigurent l’azur. Les géants et les gnomes lui plaisent. Il joue avec des coquelicots. Parmi d’étroites tonnelles tout alourdies de roses tandis qu’Ismène se pâme près de Momotombo, il conduit un troupeau d’orages. Autour d’une personne malheureuse, il émeut les quatre horizons.