Page:Bouilhet - Œuvres, 1880.djvu/22

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Et rêve, avec de molles poses,
À celui qui, chantant pour eux,
Donne plus de parfums aux roses
Et plus d’amour aux amoureux !


IV


Et pourtant, ô tendresse, ô délire, ô cantiques,
Hymnes qui du grand ciel savez faire le tour,
Poèmes qui chantez avec des voix antiques
L’éternelle jeunesse et l’éternel amour,

Ballades, secouant le tambourin des rimes,
Strophes, mètres dansants, sonnets d’espoir chargés,
Ô transports !… Vous tombez, malgré vos cris sublimes,
Des cœurs les plus perdus et les plus ravagés !

Là hurlent des désirs qui n’auront pas leur proie,
Là, saignent des douleurs qui se cachent au jour,
Là, sur toute croyance, incessamment tournoie
Le doute, oiseau des nuits, maigre comme un vautour.

Partout, le ciel de plomb, partout, le sable aride,
Pas une source fraîche, aux haltes du chemin,
Si l’on y voit germer quelque oasis timide,
Le simoun, en passant, l’emportera demain.