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tingué comme guerrier aux batailles de Marathon, de Salamine et de Platée. Il commença en 499 à faire représenter des tragédies. On peut le considérer comme le véritable créateur de la tragédie grecque : non-seulement il fit les premières pièces régulières, mais il constitua véritablement le théâtre ; au chariot ambulant de Thespis, il substitua une salle de spectacle fixe, employa le premier les décorations, le costume, la musique, en un mot tout le matériel de l'art dramatique, et perfectionna la déclamation ; en outre, il abrégea le rôle du chœur, augmenta l'importance des personnages et concentra l'intérêt sur une seule tète. Dans sa vieillesse, il eut le chagrin de se voir préférer Sophocle, et se retira en Sicile auprès d'Hiéron pour n'être pas témoin des succès de son jeune rival. Il mourut l'an 456 av. J.-C., à 69 ans : on dit qu'il fut écrasé par une tortue qu'un aigle laissa tomber sur sa tête chauve. Des 70 ou 80 tragédies qu'il avait composées, il ne nous en reste que sept : Prométhée enchaîné, les Perses, les Sept Chefs devant Thèbes, Agamemnon, les Choéphores, les Euménides, les Suppliantes. Le sujet en est le plus souvent tiré de l'histoire nationale ; le plan y est de la plus grande simplicité ; l'idée d'un destin inexorable y domine. Les éd. les plus estimées d'Eschyle sont celles de Canter, Anvers, 1580; de Stanley, avec trad. latine, Londres, 1663, de Paw, La Haye, 1745; de Schütz, Halle, 1782-1821; de Wellauer, Leipsick. 1823-1830, de Dindorf, Oxford, 1834; de G. Hermann, Leipsick, 1852 ; de Weil, 1858 et suiv. Il a été trad. en prose par Lefranc de Pompignan, 1770; Laporte-Dutheil, 1771 et 1794; Pierron, 1841; en vers par Biard, 1837, Fr. Robin, 1846, etc. M. Puech a mis en vers les Choéphores et Prométhée, 1836-38. M. Patin, dans ses Études sur les tragiques grecs, a parfaitement apprécié Eschyle.

ESCLAVAGE. V. le Diction. univ. des Sciences.

ESCLAVE (lac de l'), lac de l'Amérique anglaise (Nouv.-Bretagne), entre 112' 30'-120° 50' long. O., 60° 30'-BS" lut. N., a 450 k. sur 250. Il est navigable dans toute son étendue ; mais pendant six mois il est couvert de glaces. Il reçoit les eaux de la riv. de l'Esclave, qui vient du S. E. et qui, après l'avoir traversé, en sort sous le nom de fleuve Mackenzie.

ESCLAVES (Côte des), en Guinée. V. CÔTE.

ESCLAVES (Guerres des). On donne ce nom à trois guerres que les Romains eurent à soutenir contre leurs esclaves révoltés. Dans la 1re, qui éclata en Sicile l'an 134 av. J.-C., les esclaves se soulevèrent sous la conduite d'Eunus et de Cléon, défirent quatre préteurs et s'emparèrent d'Euna, de Tauromenium, d'Agrigente et de Messine. Il fallut les efforts de trois consuls pour les réduire ; ils furent battus par le consul Pison l'an 132. — Dès l'an 102, Salvius, dit Tryphon, Satyrus et Athénion excitèrent une 2e guerre en faisant de nouveau révolter les esclaves de Sicile : ils ravagèrent toute l'île, et assiégèrent Lilybée. Lucullus et Manius Aquilius les écrasèrent en 69. Plus d'un million d'esclaves périrent dans cette guerre. — La 3e dura de 73 à 71 av. J.-C. et eut l'Italie pour théâtre. Le gladiateur Spartacus souleva les esclaves à Capoue, ravagea la Campanie. défit le consul Lentulus, plusieurs préteurs, ainsi que le proconsul Cn. Cassius, et menaça Rome même. Crassus, plus heureux, repoussa Spartacus jusque dans la Lucanie, battit ses lieutenants, le défit lui-même près du Sdarus, et tua dans cette seule bataille plus de 40 000 esclaves : Spartacus y périt.

ESCLAVONIE ou SLAVONIE, grande prov. des États autrichiens, bornée au N. E. par la Hongrie, dont elle est séparée par la Drave et le Danube ; à l'E. par la Theiss, qui la sépare du banat de Temeswar ; à l'O. par la Croatie, au S. par la Turquie d'Europe ; capit., Eszek. Elle a de l'E. à l'O. 280 kil.; du N. au S. sa largeur varie de 20 à 80 kil. ; 700 000 hab. Elle se divise en deux parties : la partie civile ou Royaume d'Esclavonie, et la partie militaire ou Généralat d'Esclavonie. — Le Royaume d'Esclavonie, situé à l'O., se compose de 3 comitats, Werowitz ou Verœcze, Posega et Syrmie, administrés chacun par un grand palatin, et qui ont pour ch.-l. Eszek, Posega, et Vukovar. Le Généralat d'Esclavonie, à l'E., formé une des 4 parties du gouvt des Confins-Militaires ; il est divisé en 3 régiments placés sous les ordres d'un général commandant, et a pour ch.-l. Petervaradin. De hautes montagnes richement boisées traversent l'Esclavonie de l'O. à l'E., mais il s'y trouve, surtout aux env. d'Eszek, de vastes marais. La température y est douce et le sol très-fertile ; le gibier y abonde. Un étang près de Velika fournit de superbes perles. L'industrie est nulle ; le peuple, ignorant et barbare, est faux et rusé. La race dominante est celle des Slaves ou Esclavons auxquels sont mêlés des Allemands et des Madgyars. Le Catholicisme est la religion de la majorité, mais l'église grecque a aussi beaucoup d'adhérents. — L'Esclavonie faisait, sous les Romains, partie de la Pannonie ; elle dut son nom aux Slavi, peuple sarmate qui vint s'y établir au VIIe siècle. Les Slaves vécurent d'abord sous la domination des Avares ; après la destruction du royaume des Avares par Charlemagne, 799, ils reconquirent leur liberté ; au IXe siècle, ils repoussèrent l'invasion des Bulgares. C'est alors que se formèrent les deux roy. distincts de Croatie et d'Esclavonie. L'Esclavonie fut soumise par las rois de Croatie au commencement du XIe siècle ; mais de 1088 à 1091, le roi de Hongrie Ladislas I conquit les deux pays ; il donna en 1091 à son fils Almus le titre de duc de Croatie et d'Esclavonie. Depuis ce temps, l'Esclavonie, sauf quelques interruptions, a toujours fait partie du roy. de Hongrie, avec lequel elle passa aux mains de l'Autriche. Les Turcs l'envahirent plusieurs fois, de 1417 à 1476, puis en 1484 et en 1524, et ils la possédèrent même quelque temps. Depuis 1867 elle fait partie des pays trans-leithans de l'Autriche, et a une Diète en commun aveu la Croatie.

ESCOBAR-Y-MENDOZA (Ant.), Célèbre casuiste espagnol, plus connu sous le seul nom d’Escobar, né en 1689 à Valladolid, mort en 1669, appartenait à l'ordre des Jésuites. Il eut pendant sa vie une grande réputation comme prédicateur, et fut un modèle de piété. Cependant on lui reproche d'avoir enseigné une morale relâchée, et d'avoir excusé certaines fautes en alléguant la pureté des intentions et en recourant à des distinctions subtiles, qui pourraient favoriser la mauvaise foi. Pascal a, dans ses Provinciales (surtout dans la 5e et la 6e lettre), livré au ridicule quelques-unes des opinions soutenue par ce casuiste, et depuis, son nom est devenu, quoique injustement peut-être, le symbole de ce genre de détours et d'équivoques qu'on appelle escobarderie. Parmi les nombreux ouvrages d'Escobar, qui forment environ 40 vol. in-fol, on remarque un poëme latin sur Ignace de Loyola, 1614, œuvre de sa 1re jeunesse ; un abrégé des Cas de Conscience (Summula casuum conscientiæ), 1626, et une Théorie morale, en 7 vol. in-fol., 1643. C'est son traité des Cas de conscience qui a été le plus attaqué.

ESCOIQUIZ (don Juan), ministre d'État espagnol, né en 1762 dans la Navarre, mort en 1820, était chanoine de Saragosse quand il fut nommé précepteur du prince des Asturies (Ferdinand VII). Ennemi mortel du prince de la Paix, qui l'avait fait exiler à Tolède, il fut un des premiers moteurs de la révolution qui chassa du trône Charles IV pour y mettre son fils Ferdinand. Ce fut aussi lui qui décida ce prince en 1808 à se rendre à l'entrevue de Bayonne avec Napoléon ; il l'y accompagna, mais il le dissuada d'abdiquer. Après la fatale issue du voyage, il tenta vainement de faire rendre là liberté aux princes espagnols, mais il fut retenu lui-même et fut interné à Bourg. Il rentra en Espagne avec Ferdinand VII en 1814, mais il ne tarda pas à perdre la faveur de ce prince ingrat. On a de lui un Exposé des motifs qui ont engagé Ferdinand VII à se rendre à Bayonne.

ESCUALDANAC. V. BASQUES.