Page:Bouilly - Léonore, ou L’Amour conjugal, 1798.djvu/17

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LÉONORE ; _avec altération._

En rêvant…. Moi, j’ai parlé en rêvant. MARCELINE.

Certainement ; et bien distinctement encore…. Tu venois d’faire tes commissions : accable de fatigue et d’chaleur, tu t’étois endormi sous les arbres qui sont dans cette cour. (_Elle désigne l’arcade qui est ouverte._) Je m’approchai bien doucement, bien doucement, persuadée que tu jouissois d’un sommeil paisible…. Mais tu me parus agité ; de longs soupirs sortoient du fond de ta poitrine, et avec ce ton… là…. de quelqu’un bien en peine, tu prononças ces mots :…. « Je le découvrirai… oui, oui, je le découvrirai. » LÉONORE, _avec le plus grand trouble._

Et…. Je ne dis rien autre chose ! MARCELINE.

Je n’entendis que cela. LÉONORE, _reprenant ses sent par degrés._

Tu le vois, Marceline ; le besoin de connoître les auteurs de ses jours, est si bien commandé par la nature, qu’il nous poursuit jusque dans les bras du sommeil. MARCELINE.

C’est aussi te donner trop d’tourmens…. oh ! je m’promets bien quand tu s’ras mon mari, de n’pas t’laisser faire de ces vilains rêves-là…. Mais voici bientôt l’heure où les prisonniers du p’tit pavillon vont v’nir prendre l’air dans ces cours, je vais emporter chez nous tout mon linge, afin d’séparer c’qui vient à chacun d’eux. (_Elle va chercher le linge qui est sur la table qu’elle pousse tout près de la coulisse, et sous laquelle elle met ses fers et son fourneau._) LÉONORE.

Attends, je vais t’aider. MARCELINE.

Non, non ; c’est inutile…. Mon père ne va pas tarder à r’venir, faut l’attendre ici, afin d’savoir c’que le gouverneur…. Et s’il y a d’bonnes nouvelles pour nous, tu viendras tout de suite m’en faire part. LÉONORE.

Sois tranquille. MARCELINE.

Allons, du courage, mon ami, du courage !…. Va, si tu