Page:Bouilly - Léonore, ou L’Amour conjugal, 1798.djvu/22

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Sauve à la fois, Dieu tout-puissant, L’amour, l’hymen et l’innocence…. Dans un moment peut être, hélas ! Sur mon époux une main sanguinaire…. Soutiens une force ; ô ciel ! arme mon bras ; Dans son cachot condois mes pas. Si je ne puis le rendre la lumière, J’y pourrai du moins recueillir Ses adieux, son dernier soupir… Ô toi, mon unique espérance, etc.

J’ai pensé vingt fois me trahir devant ce geôlier….. À travers sa rudesse, il porte un cœur vraiment sensible… Si je lui découvrois qui je suis !… Peut-être que mon dévouement, la singularité de ma situation…. mais il est trop attaché aux profits de son emploi, pour accepter mes offres ; il redoute trop la puissance et l’inflexibilité du gouverneur, pour ne pas me sacrifier à ce barbare. Non, non ; il faut suivre mon projet…. (_Ici on entend l’horloge._) Trois heures sonnent ; exécutons d’abord les ordres qu’on m’a donnés ; ils sont sacrés pour moi, puisqu’ils ont pour objet le soulagement de tant d’infortunés. (_Ella va ouvrir la grille, et revient sur le devant du théâtre._) Allons, le sort en est jeté…. sauvons mon époux, ou mourons avec lui. (_Ella sort._)



Scène IX

PRISONNIERS DE TOUT ÂGE.

(_Ils descendent de la grille pendant le morceau suivant ; et remplissent le théâtre._) CHŒUR.

Que ce beau ciel, cette verdure, Versent sur nous un baume frais ! Qu’il cruel, douce nature, D’être privé de tes bienfaits ! UN PRISONNIER.

Mais livrons-nous à l’espérance, Peut-être un jour la providence Pourra de notre sort adoucir la rigueur Et nous rendre l’indépendance. TOUS LES AUTRES, _chacun à part avec l’élan le plus vif._

Je pourrais, juste ciel, retrouver le bonheur ? Et renaître à l’indépendance ?….