Page:Bouilly - Léonore, ou L’Amour conjugal, 1798.djvu/28

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LÉONORE, _avec le plus grand trouble, et cherchant la figure du prisonnier._

Oui, oui…. il vient de relever la tête. ROC.

Il va sans doute faire encore mille questions, il faut que j’lui parle seul… Voilà qui est à-peu-près terminé… (_Il remonte de la fosse._) Descends à ma place, et acheve d’enlever le reste de ces décombres, afin qu’on puisse ouvrir aisément cette citerne.

(LÉONORE, _elle descend dans la fosse en frémissant._)

(_À part pendant que ROC s’approche doucement de Florestan._)

Ce qui se passe en moi est inexprimable…. Ecoutons !…. ROC, _à Florestan._

Eh ben, vous v’nez donc d’prendre quelques momens de repos ! C’est toujours ça. FLORESTANT, _sans détourner encore la tête._

De repos, dites-vous ? LÉONORE, _toujours à part._

Cette voix…. FLORESTANT, _sur le même ton et dans la même attitude._

Ah, dites plutôt de l’accablement le plus affreux…. de la mort la plus douloureuse. LÉONORE.

Si je pouvois un seul instant découvrir sa figure ! FLORESTANT, _toujours à ROC._

Serez-vous toujours insensible au cri de l’innocence ?… N’aurez-vous jamais pitié du malheureux Florestan ?

(_En prononçant ces derniers mots, il tourne sa figure du côté de Léonore._) LÉONORE.

Enfin le voilà… (_elle tombe éperdue sur le bord de la fosse._) ROC, _toujours à Florestan._

Eh ! que voulez-vous que je fasse ?… J’exécute les ordres qu’on m’donne : c’est mon métier. FLORESTANT.

Ah ! je n’exige rien qui soit contre votre devoir ; mais ne pourriez-vous, sans y manquer, m’apprendre enfin qui commande en ces lieux ; quel est le gouverneur de ces prisons d’état ?