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LA NEF DE SALOMON

épée, comme la Vierge qui est à venir amendera le méfait de notre première mère. »

« Ainsi fut fait, et, six mois plus tard, le navire était construit. L’épée y fut posée sur un lit magnifique ; mais la dame déclara qu’il manquait encore quelque chose. Elle commanda aux charpentiers d’aller couper dans l’arbre de vie et dans ceux qui en étaient issus un fuseau rouge, un fuseau blanc et un fuseau vert. Et aux premiers coups de coignée qu’ils donnèrent, ils virent les arbres saigner, dont ils furent très épouvantés ; mais la dame exigea qu’ils achevassent leur besogne. Et les fuseaux furent plantés sur les côtés du lit ; puis Salomon grava sur la lame et le fourreau les lettres qui interdisaient de dégainer l’épée à tout chevalier qui ne serait pas le meilleur des meilleurs ; enfin il glissa sous le chevet un bref où il expliquait la signifiance de la nef et de tout, et qui commençait ainsi :


« Ô chevalier, qui seras le dernier de mon lignage, si tu veux être en paix, garde-toi des femmes sur toute chose. Si tu les crois, ni sens, ni prouesse, ni chevalerie ne te garantiront d’être honni.


Quand tout fut achevé de la sorte, on mit la nef à l’eau. Et bientôt la brise en frappa les voiles, et en peu d’heures l’éloigna de la rive et