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MERLIN L’ENCHANTEUR

je veux vous dire qu’un cœur d’homme ne peut venir à honneur s’il est trop longtemps en tutelle, car il lui faut trop souvent trembler. Je ne veux plus de maître ; je dis maître, non pas seigneur ou dame. Malheureux le fils de roi qui ne peut donner de son bien hardiment !

— Pensez-vous être fils de roi, parce que je vous appelle parfois ainsi ? Vous ne l’êtes point.

— Dame, fit l’enfant en soupirant, cela me peine, car mon cœur l’oserait bien être.

Alors la Dame le prit par la main et, l’emmenant un peu à l’écart, elle le baisa sur la bouche et les yeux si tendrement qu’à la voir, nul n’eût pu croire qu’il ne fût son enfant.

— Beau fils, ne soyez point triste, lui dit-elle : je veux qu’à l’avenir vous donniez tout ce qu’il vous plaira. Et désormais vous serez sire et maître de vous-même. Quel que soit votre père, vous avez montré que vous avez le cœur d’un roi.


XI


Quelque temps après, elle appela une de ses pucelles, nommée Saraide, qui était belle, sage et courtoise, et l’envoya, après lui avoir dit ce qu’elle y aurait à faire, en la cité de Gannes.

Le roi Claudas y tenait sa cour le jour de la