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TRISTESSE DE GALEHAUT

s’écroulèrent et toute la forteresse s’effondra.

Galehaut demeura tout d’abord si étonné qu’il ne put que se signer sans sonner mot. Mais, comme Lancelot se peinait fort à le consoler, il sourit et lui dit :

— Comment, beau doux ami, croyez-vous que ce soit la chute de mon château qui m’angoisse de la sorte ? Jamais personne ne me verra navré d’aucune perte que j’aie faite de bien ou d’avoir. Ce qui m’émeut, c’est que mon cœur m’annonce de grands maux à venir, et lequel pourrait être plus grand que celui de vous perdre ? Je souhaite que Dieu ne me laisse pas vivre un seul jour après vous, et si madame la reine avait aussi bon vouloir envers moi que j’ai envers elle, elle ne vous arracherait pas à moi. Mais j’ai bien vu qu’elle ne s’en peut empêcher. Sachez pourtant que, lorsque je perdrai votre compagnie, le siècle perdra la mienne.

Tout en causant ainsi, ils parvinrent au bourg qui était sous la forteresse, où les écuyers de Galehaut avaient fait apprêter son logis, et les habitants s’émerveillèrent de voir leur seigneur si peu escorté, car il avait accoutumé d’avoir toujours une grande suite de chevaliers. De là, il envoya des messagers convoquer ses barons à Sorehaut, qui était la maîtresse cité du Sorelois, quinze jours avant la Noël. Puis il fit écrire une lettre au roi Artus, où il le priait comme son seigneur et son bon ami de lui envoyer les plus