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LES AMOURS DE LANCELOT DU LAC

— Mais comment messire le roi le lui a-t-il octroyé ? Il est si jeune !… Levez-vous, beau doux sire. Je ne sais qui vous êtes, peut-être meilleur gentilhomme que l’on ne suppose, et je vous souffre à genoux devant moi ! Je ne suis guère courtoise !

— Ha ! dame, dit le damoisel en soupirant, pardonnez-moi la folie que j’ai faite !

— Et quelle folie ?

— J’ai pensé sortir de céans sans avoir congé de vous.

— Beau doux ami, vous êtes assez jeune homme pour qu’on vous pardonne un si grave méfait !

— Dame, merci.

Et, après avoir hésité un instant, il dit encore :

— Dame, si vous vouliez, je me tiendrais toujours pour votre chevalier.

— Je le veux bien. Adieu, beau doux ami.

Elle le fit lever en lui donnant la main ; certes il fut bien aise quand il sentit cette main toucher la sienne, toute nue. Il salua les dames et les demoiselles qui avaient ouï parler de sa bonne grâce et de son excellente beauté et qui avaient toutes l’œil sur lui, durant qu’il s’entretenait avec la reine, s’émerveillant que Nature l’eût si bien pourvu de ce qu’elles désiraient le plus ; puis il revint à son logis pour se faire armer. Et là, messire Yvain s’aperçut qu’il n’avait pas d’épée.