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JALOUSIE DES COMPAGNONS

était du parti contraire au vôtre, vous seriez tous défaits.

— Dame, je sais bien qu’il est le meilleur du monde. Mais nous sommes ici cent trente au moins, et contre trois ou quatre seulement d’entre nous, que pourrait-il faire, lui tout seul ?

Or, en écoutant les propos de la reine, les compagnons de la Table ronde, hormis messire Gauvain, avaient tous pensé avec amertume : « Si même nous vainquions tout sans que Lancelot eût frappé un seul coup, on dirait encore que c’est lui qui a le mieux fait et on lui donnerait le prix, comme toujours ! » C’est pourquoi plus de cent d’entre eux convinrent que, si Lancelot arrivait à temps pour le tournoi, ils prendraient des armes déguisées et passeraient dans l’autre camp. Mais la reine, qui connut leur cabale le soir même, résolut d’en avertir son ami. Elle lui écrivit de sa main un bref qu’elle confia à son écuyer Tarquin, dont elle était sûre ; et le messager battit les routes à franc étrier devers la forêt Périlleuse, tant qu’enfin il joignit Lancelot près du château de Montiguet, sur le chemin de la Croix au Géant.

— Allez, répondit celui-ci après avoir baisé secrètement la lettre, et dites à madame que je ferai ce qu’elle m’a mandé.

Puis il fut trouver le roi Baudemagu de Gorre qui était venu pour le tournoi, et il lui demanda