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LE CHÂTEAU AVENTUREUX

— Que faites-vous, bel ami ? demanda le sénéchal surpris.

— Je voudrais prendre les armes que le roi m’a données. Mais elles tiennent si bien au corps qu’elles en font partie, ce me semble. Aussi veux-je brûler la chair pour avoir la carapace.

— Je les détacherai bien, si vous voulez.

— Faites donc vite.

Keu dévêtit le mort sans lui laisser rien. Mais le valet ne voulut prendre ni la cotte de soie que l’Orgueilleux portait sous son haubert, ni les bottes qu’il avait aux pieds, pour prière que le sénéchal lui en fit.

— Croyez-vous que je changerai ma bonne chemise de chanvre que ma mère me fit l’autre jour pour cette soie, comme vous l’appelez, toute molle, toute fragile, et que je laisserai pour celle-ci ma cotte de cuir que l’eau ne peut traverser ? Honni soit qui échange ses bons draps contre de mauvais !

Le sénéchal lui laça donc les chausses de fer et les éperons, puis il lui passa le haubert, le coiffa du heaume, lui ceignit l’épée, et, après l’avoir fait monter sur le grand destrier, il lui bailla la lance et l’écu. Et Perceval s’émerveilla des étriers, lui qui n’en avait jamais vu, et des éperons, n’ayant jamais usé que d’un fouet.

— Beau sire, dit-il à Keu, prenez mon petit