Page:Bouniol - Les rues de Paris, 1.djvu/211

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Les deux courageux avocats, après avoir été fouillés et longuement interrogés sans qu’on trouvât rien à leur charge, furent laissés cependant dans la prison : « moins occupés de ce que nous allions devenir, dit la Notice historique, que de l’épouvantable issue de cet horrible procès. Quand on nous mit en liberté… la Reine n’existait plus. »

Sept mois après, Chauveau-Lagarde fut averti par un message de Mme Élisabeth, qu’il était choisi pour la défendre. C’était la veille même du jugement (9 mai 1794). Tout aussitôt, il courut à la prison, mais on ne lui permit pas de communiquer avec son auguste cliente. Fouquier-Tainville, par une exécrable perfidie, motiva le refus d’autorisation sur l’ajournement du procès qui ne devait pas avoir lieu de sitôt ; et le lendemain matin, en entrant dans la salle des séances du tribunal, Chauveau-Lagarde avait la douleur d’apercevoir « Mme Élisabeth environnée d’une foule d’autres accusés, sur le haut des gradins où on l’avait placée tout exprès la première pour la mettre plus en évidence. »

L’acte d’accusation fut plus absurde et plus odieux, s’il était possible, que celui dirigé contre la Reine : on en jugera par ces deux griefs principaux : « La complicité dans la conspiration du Roi et de la Reine contre la nation.— Les secours donnés par elle (Madame) aux blessés du Champ-de-Mars qu’elle avait pansés de ses propres mains. »

« Accusation monstrueuse, dit éloquemment Chauveau-Lagarde, et bien digne de ces temps d’irréligion et d’immoralité où ce qui paraissait le plus criminel à ces