Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/281

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il puisa, suivant Bellori, le lait de la peinture et la vie de l’expression. »

Malheureusement il s’interrompit au milieu de ces fructueuses études par condescendance pour son ami qui, retournant en Poitou, l’invita à l’accompagner dans sa famille, en lui offrant l’hospitalité, avec l’espoir qu’il trouverait à s’occuper dans le château d’une façon utile et intéressante. Mais il en fut tout autrement que le jeune artiste n’avait pensé « et le Poussin, dit M. Bouchitté[1], fut exposé en cette circonstance à des humiliations que quelques artistes et beaucoup de gens de lettres avaient éprouvées avant lui, dans un siècle et chez une nation qui ne faisait que de naître à l’amour des arts et à la culture littéraire. La mère du jeune gentilhomme avait peu de goût pour les tableaux, l’âge de son fils lui laissait, avec la libre disposition de sa fortune, la direction de la maison ; elle jugea utile d’occuper le Poussin de soins domestiques, sans lui laisser le temps de cultiver la peinture. »

On comprend que pareil emploi ne pouvait convenir à l’artiste blessé dans son affection comme dans sa dignité. Préférant la misère à cette hospitalité trop différente de celle qu’on lui avait promise, il quitta le château un matin, et, en attendant qu’il lui fût possible de regagner Paris, il se mit à parcourir la province, s’aidant pour subsister du produit de travaux qu’il n’obtenait pas sans peine. C’est ainsi qu’il peignit divers paysages pour le château de Clisson, une Bacchanale pour celui de Chaverny (1616-1620) ; et saint

  1. Histoire de Poussin, 2e édit., Didier, éditeur.