Page:Bouniol - Les rues de Paris, 2.djvu/84

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tout favorable. Il en fut autrement, cependant, grâce à de misérables intrigues et à l’influence de Perrier, qui ne pouvait consentir au triomphe de son rival. L’Académie ajourna sa décision, en demandant de nouveaux essais, de nouvelles expériences, trop onéreuses en ce moment pour l’inventeur. Il devait craindre, d’ailleurs, que la mauvaise volonté qui se trahissait dans cette réponse ne persévérât quand même, et que de nouveaux sacrifices fussent en pure perte. En définitive, pour l’instant du moins, la découverte fut enterrée, et qui sait combien d’années encore devaient s’écouler avant qu’on vît de rechef un bateau à vapeur sillonner la rivière de la Saône ?

Cependant, au milieu de ces déboires, Jouffroy fut consolé par quelques nobles témoignages de sympathie. Des personnages considérables par le rang ou par le mérite lui écrivirent pour l’encourager. Plusieurs même lui firent offrir des lettres de recommandation pour l’Angleterre. Il remercia mais sans pouvoir se résigner à accepter. « À Dieu ne plaise, répondait-il par une généreuse inspiration de patriotisme, que je porte en pays étranger une découverte de cette importance ! J’ai dans l’avenir de cette idée une foi inébranlable. Tôt ou tard, le Ciel aidant, elle doit triompher, et je veux que la France, que ma chère patrie, en recueille tout l’honneur comme les avantages. »

Jouffroy, quand il parlait ainsi, cependant ne recueillait, pour prix de ses travaux et de ses sacrifices que l’indifférence, que le dédain, que l’ingratitude. Il n’ignorait pas qu’à la cour de Versailles même, on le surnommait : Jouffroy la Pompe et que la foule toujours