Page:Bourdon - En écoutant Tolstoï.djvu/319

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Oui, maintenant, les idées des hommes sur la guerre sont bien différentes de ce qu’elles étaient autrefois, même récemment, en 1877. Jamais il ne s’est passé ce qui se passe maintenant. Les journaux écrivent qu’à la venue du tsar, qui parcourt maintenant la Russie pour hypnotiser les hommes envoyés au meurtre, le peuple manifeste un enthousiasme indescriptible. Mais, en réalité, il se fait tout autre chose. De tous côtés, on entend dire que là, trois réservistes se sont pendus ; ailleurs, c’est deux. Une femme, dont le mari a été appelé, a apporté ses enfants à la chancellerie, et les a abandonnés là. Une autre s’est pendue dans la maison du chef de recrutement. Tous sont mécontents, sombres, excités. Les mots : « Pour la religion, pour le tsar, pour la patrie », les hymnes et les cris « hourra ! » n’agissent plus sur les hommes comme autrefois. Une autre guerre, celle de la conscience de l’injustice et du péché de l’œuvre à laquelle sont appelés les hommes, entraîne de plus en plus les peuples.

Oui, la grande lutte de notre temps n’est pas celle qui se passe maintenant entre les Russes