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Page:Bourges - Le Crépuscule des dieux, 1901.djvu/37

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le crépuscule des dieux

régna. Wagner tout droit au pupitre-chef, ses cheveux gris tombant en désordre autour de ses tempes, maigre, avec son nez d’aigle et ses yeux perçants, marquait lentement les mesures. Le thème de l’Épée flamboya dans l’orchestre. Sieglinde montrait à Siegmund la garde d’or d’un glaive au flanc du hêtre. Un étranger était venu un jour, avait poussé le fer jusqu’au cœur de l’arbre… Mais un trouble la saisissait, une sorte de langueur amoureuse ; des silences haletants coupaient le dialogue ; des soupirs lui gonflaient la poitrine ; l’aveu suprême leur échappait.

À ce moment, quelqu’un gratta, timidement d’abord, puis avec du bruit, contre la porte de la loge, et quand M. Smithson l’eut ouverte, un capitaine effaré se montra.

— Qu’y a-t-il donc, monsieur, de si pressé ? fit d’Œls sèchement, sur quoi, l’autre, en balbutiant, remit une lettre au vieux chambellan. Elle avait été apportée à franc étrier, par un garde du forestier de Mannersberg, et l’affaire était capitale, ainsi qu’en témoignaient ces mots tracés sur l’enveloppe : Je supplie Votre Altesse Sérénissime d’ouvrir cette lettre immédiatement. Alors, comme entendant enfin le murmure du colloque derrière lui, le Duc s’était retourné furieux, M. d’Œls lui tendit la missive, scellée d’un large cachet de cire rouge.