Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/154

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fallait d’autant plus qu’elle avait un amant. Sinistre expiation de son grand amour, dont elle se justifiait en se disant qu’elle devait cela à Hubert ! Si jamais elle devenait mère, pouvait-elle s’enfuir avec lui et lui prendre sa vie ? Et l’implacable nécessité des meurtriers mensonges et des avilissants partages venait la torturer en plein bonheur. Elle s’en absolvait cependant, puisque c’était pour lui, son bien-aimé, qu’elle mentait…

Oui, mais quelle monstrueuse énigme se dressait souvent devant elle ? Ah ! la cruelle, cruelle énigme ! Comment, avec cet amour sublime dans son cœur, avait-elle pu faire ce quelle avait fait ? Car c’était bien elle et non pas une autre, elle, avec ses pieds qu’elle sentait glacés, avec ses mains qui pressaient son front où battait la fièvre ; elle, avec tout son être physique enfin, qui était partie pour Trouville à la fin du mois de juillet ; elle, Thérèse de Sauve, qui s’était installée pour la saison dans une villa sur la hauteur. Oui, c’était elle… Et pourtant, non ! Il n’était pas possible que la maîtresse d’Hubert eût fait cela… Quoi ? cela ? Ah ! cruelle, cruelle énigme !… De quelles profondeurs de la mémoire de ses sens étaient donc sortis ces passages étranges, ces sourdes tentations de luxure qui avaient commencé de l’assaillir ?