Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ses boucles brunes, en ce moment dérangées, achevaient de rendre presque pareille aux portraits exécutés par le peintre de Charles Ier. Il vit son parrain et se leva pour le saluer. Il était bien pris dans ; une taille petite, et rien qu’à la grâce avec laquelle il tendait la main on devinait la longue surveillance des yeux maternels. Nos façons ne restent-elles pas l’œuvre indestructible des regards qui nous ont suivis et jugés durant notre enfance ?

— « Tu as donc à me parler d’affaires bien graves ? » dit le général, allant droit au fait. « Je m’en doutais, » ajouta-t-il ; « j’ai laissé ta mère et ta grand’mère plus tristes que je ne les avais vues depuis la guerre d’Italie. Pourquoi n’étais-tu pas auprès d’elles ce soir ?… Si tu ne rends pas ces deux femmes heureuses, Hubert, tu es cruellement ingrat, car elles donneraient leur vie pour ton bonheur… Enfin, que se passe-t-il ?… »

Le général avait prononcé cette phrase en continuant à voix haute les pensées qui l’avaient tourmenté durant le trajet de la rue Vaneau à son logis. Il put voir, à mesure qu’il parlait, les traits du jeune homme s’altérer d’émotion. C’était une fatalité héréditaire du tempérament de cet enfant trop aimé, qu’un son de voix dure lui donnât toujours un petit spasme douloureux au cœur. Mais, sans doute, la dureté de l’accent du