Page:Bourget - Drames de famille, Plon, 1900.djvu/219

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Alors, » insista-t-il, « si l’obstacle ne vient ni de votre père ni de votre mère, il ne peut venir que de vous… C’est donc une idée que vous vous êtes faite, et qui vous a conduite à revenir sur votre décision… Ce ne peut pas être autre chose… » Et, déjà, si l’innocente Reine avait eu quelque connaissance des arrière-fonds du cœur de l’homme, elle aurait deviné que cette phrase révélait un recul devant une certaine pensée, et la soudaine apparition de la jalousie : « Hé bien, » supplia-t-il, « quelle que soit cette idée, dites-la-moi, Reine… Je vous crois. Je crois que vous m’aimez comme je vous aime… Ce n’est donc pas seulement de mon bonheur qu’il s’agit, c’est de notre bonheur à tous deux… Ne le jouez pas sur une chimère, car ce ne peut être qu’une chimère, j’en suis sûr… Dites-moi votre raison. Nous la discuterons ensemble… Si c’est un secret, vous me devez de croire que je suis capable de garder un secret, quand il est à vous. Quand vous m’aurez parlé, vous en serez étonnée vous-même, tout se dissipera, comme un cauchemar. Allons, vous aussi, ayez confiance en moi, parlez-moi… » — «  Ah ! » gémit-elle, avec un accent de souffrance qui, cette fois, atteignit Charles jusqu’au cœur : « Si j’avais pu, est-ce que je ne vous aurais pas parlé tout de suite ?… Je vous ai demandé d’avoir foi en moi, » continua-t-elle en joignant ses mains qui tremblaient, «  J’espérais de vous que vous me croiriez… Je vous le demande encore : croyez-moi, croyez que si je suis venue vous dire